L'influenza aviaire en 11 questions
L'influenza aviaire est une infection virale hautement contagieuse des oiseaux sauvages et domestiques, y compris d’élevage. Les périodes et mouvements de migration des oiseaux sauvages ont un impact sur le risque de transmission des virus aux oiseaux d’élevage, de compagnie et à ceux des parcs zoologiques. Profil de la maladie et tour d’horizon des actions de l’Anses dans la lutte contre la propagation de ces virus.
Qu’est-ce que l’influenza aviaire ?
L’influenza aviaire est une maladie animale très contagieuse causée par des virus influenza de type A, qui peut toucher de très nombreuses espèces d’oiseaux sauvages, de compagnie et à ceux dans les parcs zoologiques.
On distingue deux catégories de virus selon leurs caractéristiques de virulence pour les oiseaux :
les virus faiblement pathogènes (IAFP),
les virus hautement pathogènes (IAHP), ces derniers appartenant tous aux sous-types H5 ou H7 (voir encadré).
Sous sa forme hautement pathogène, la maladie se propage très rapidement chez les oiseaux et peut entraîner des conséquences importantes tant dans les élevages que pour la faune sauvage. Elle peut provoquer une mortalité très élevée chez certaines espèces.
Pourquoi utilise-t-on les lettres H et N pour nommer les virus d’influenza aviaire ?
Les virus de l’influenza aviaire sont classés selon les caractéristiques de deux des protéines de l’enveloppe virale (structure externe du virus) qui sont déterminantes pour les réponses immunitaires des oiseaux infectés :
- l’hémagglutinine : 16 sous-types numérotés de H1 à H16 existent chez les oiseaux,
- la neuraminidase : 9 sous-types numérotés de N1 à N9 existent chez les oiseaux.
Toutes les combinaisons sont possibles entre les différents sous-types de protéines. La combinaison H et N définit le sous-type viral, par exemple une souche virale de sous-type H5N1 a été responsable des épisodes 2021-2022 et 2022-2023 survenus dans les élevages en France.
Quelle est la situation actuelle en France ?
En France, depuis 2015, des virus hautement pathogènes ont été à l’origine d’épizooties d’ampleur croissante, en particulier au sein des élevages de palmipèdes du sud-ouest de la France. Ces épisodes, qui ont pour la plupart également touché les autres pays européens, ont conduit à un nombre de volailles abattues jamais atteint en France ou en Europe.
Quels virus circulent actuellement ?
La souche hautement pathogène A (H5N1) du virus de l’influenza aviaire fait parler d’elle depuis 1997, en raison d’importants foyers en Asie chez les oiseaux d’élevage et sauvages et de son potentiel zoonotique, c’est-à-dire sa capacité à infecter l’être humain dans certaines conditions.
Depuis 2003, cette souche s’est propagée mondialement et circule toujours actuellement. Des virus H5N6, H5N5 ou H5N8 qui en sont dérivés se diffusent également ces dernières années. Ces derniers sont préoccupants en raison de leur degré de virulence et de leur large distribution, non seulement chez les volailles mais également chez les oiseaux sauvages.
Au-delà des oiseaux, d’autres animaux sont-ils concernés ?
Certaines souches du virus peuvent infecter des mammifères tels que le porc, le furet, le vison, le renard ou encore les chats. Elles peuvent provoquer des symptômes respiratoires ou neurologiques chez ces espèces.
Lorsqu’un virus des oiseaux infecte un mammifère (humain ou animal), certaines mutations peuvent être sélectionnées chez le virus et favoriser sa multiplication ou sa transmission chez cette nouvelle espèce hôte.
Les êtres humains peuvent-ils être contaminés ?
L’influenza aviaire est une maladie à potentiel zoonotique,le virus peut donc, dans certaines conditions, se transmettre à l’être humain. Cette transmission peut avoir lieu, en l’absence du port d’équipements de protection individuelle lors de contacts fréquents et/ou prolongés avec des animaux infectés par le virus, que ceux-ci présentent ou non des symptômes.
Le virus provoque alors chez l’être humain des symptômes ressemblant le plus souvent à un rhume ou une grippe banale, qui peut dans des cas extrêmement rares s’aggraver rapidement du fait de troubles respiratoires sévères. La transmission interhumaine est rarissime. À ce jour, aucun cas humain n’a été observé en France. Il est cependant recommandé aux personnes ayant été en contact avec des volailles infectées et qui présenteraient ensuite des signes respiratoires, de le mentionner à leur médecin.
Enfin, l’existence d'une infection simultanée par un virus de la grippe aviaire et par un virus de la grippe humaine chez un être humain ou chez un porc pourrait favoriser un réassortiment. Il s’agit d’un mélange de matériel génétique entre les deux virus, ce qui peut conduire à l’émergence d’un nouveau virus très contagieux pour l'être humain. C’est pourquoi, il est conseillé aux personnes en contact avec les oiseaux ou les porcs infectés de se faire vacciner contre la grippe saisonnière.
Influenza avaire et grippe aviaire : quelle différence ?
Quand la maladie se manifeste chez les oiseaux, on parle d’influenza aviaire.
Quand une grippe humaine est provoquée par des virus influenza A d’origine aviaire, on parle alors de grippe aviaire.
Comment se transmet l’influenza aviaire ?
Les volailles d’élevage peuvent être contaminées par les oiseaux sauvages infectés ou, lors d’épizootie, par d’autres oiseaux domestiques, qu’ils soient d’élevage ou d'agrément (basses-cours, oiseaux d’ornements, appelants utilisés pour la chasse au gibier d’eau). Un grand nombre d’espèces d’oiseaux peuvent infectées.
De nombreux facteurs peuvent contribuer à la propagation des virus d’influenza aviaire :
- les déplacements migratoires des oiseaux sauvages,
- les pratiques d’élevage,
- les flux de personnes et de matériels au sein des filières de production ou entre les volailles d’agrément et les élevages.
La transmission entre oiseaux peut être directe, par des contacts rapprochés entre individus - sécrétions respiratoires, matières fécales - ou indirecte, par l’exposition à des matières ou supports contaminées : nourriture, eau, matériel, plumes, poussières,ou vêtements. Le virus pénètre dans l’organisme des volailles par la voie respiratoire ou par la voie digestive.
Le saviez-vous ?
Les virus influenza A possèdent une grande « plasticité », ce qui veut dire qu'ils évoluent en permanence en échangeant leurs gènes ou en acquérant des mutations : autant d’évènements susceptibles de permettre à ces virus d’infecter de nouvelles espèces, de « contourner » les défenses immunitaires de l’hôte animal ou humain ou de devenir le cas échéant plus virulents.
Comment se manifeste l’influenza aviaire ?
Selon les modalités d’exposition et la virulence de la souche virale, la période d'incubation de la maladie peut varier de 1 à 3 jours au niveau individuel et s’étendre jusqu’à 14 jours au niveau d’un troupeau de volailles. Les symptômes chez les oiseaux sont divers : troubles nerveux (paralysie, convulsions, perte d’équilibre), troubles respiratoires, troubles digestifs, œdème de la tête, baisse du nombre d’œufs pondus et mortalité, qui dans les cas les plus graves peut apparaître quasiment sans symptômes préalables.
La maladie peut aussi être asymptomatique et seulement détectable par des analyses en laboratoire ou se manifester par des formes modérées : diminution de l’appétit, baisse de ponte, signes respiratoires plus ou moins discrets, etc.
Où est présente l’influenza aviaire ?
L’influenza aviaire touche le monde entier avec différentes souches virales plus présentes dans certaines parties du monde que d’autres. Depuis les années 1950, de nombreux épisodes plus ou moins graves liés aux virus d’influenza aviaire hautement pathogènes ont été rapportés dans le monde dans les élevages de volailles ou chez les oiseaux sauvages.
Existe-t-il un traitement contre les virus d’influenza aviaire ?
Des vaccins sont disponibles dans le monde, mais un seul dispose à ce jour d’une autorisation de mise sur le marché en Europe car la vaccination à de très rares exceptions près (animaux de zoo) était jusqu’à récemment interdite. La réglementation européenne a été modifiée en 2023 pour permettre aux Etats de décider du lancement de campagne de vaccination si la situation sanitaire le justifie. Elle autorise la vaccination des volailles sous certaines conditions dont la mise en place d’une surveillance des élevages vaccinés, de façon à garantir l’absence d’infection inapparente chez ces animaux. En effet, les vaccins disponibles diminuent mais n’annulent pas totalement l’excrétion du virus par les oiseaux qui, même vaccinés, pourraient malgré tout être infectés. Il est donc important de définir des programmes de surveillance des futurs troupeaux vaccinés, pour détecter une éventuelle circulation du virus. Des tests spécifiques validés seront utilisés pour permettre de distinguer, parmi les volailles vaccinées, celles qui seraient infectées.
Pour répondre plus facilement à ces exigences, de nouvelles générations de vaccins et de nouvelles techniques de détection sont d’ores et déjà accessibles ou bien en cours de développement. Il est par ailleurs important de disposer de vaccins adaptés aux virus d’influenza aviaire circulant au sein de chaque espèce d’oiseaux domestiques à une période donnée. Plusieurs vaccins ayant prouvé leur effet protecteur contre les souches virales qui circulent ont ainsi reçu une autorisation temporaire d’autorisation (ATU) en France pour une utilisation dès 2023, afin de disposer rapidement de solutions vaccinales.
Comment lutter contre la maladie dans les élevages ?
La lutte contre la maladie est aujourd’hui essentiellement basée sur :
le renforcement de la biosécurité dans les périodes à risque, avec la mise à l’abri des oiseaux et le renforcement des mesures d’hygiène à l’entrée des élevages (nettoyage du matériel, changement de tenue de travail, lavage des mains, etc.), pour éviter la contamination à partir des oiseaux sauvages, ou la transmission entre élevages ;
la surveillance des élevages de volailles, avec comme objectif la détection précoce et l’élimination aussi rapide que possible des volailles infectées.
En période d’épizootie, des mesures de dépeuplement des zones les plus affectées, de façon à limiter le nombre de volailles sensibles présentes et susceptibles de contribuer à la diffusion de la maladie.
Qu’est-ce que la biosécurité ?
La biosécurité recouvre l'ensemble des mesures mises en place pour prévenir les risques d’introduction et de diffusion des maladies infectieuses.
La surveillance de l’influenza aviaire est réglementée au niveau international. La maladie est classée par le règlement européen relatif aux maladies animales transmissibles en danger sanitaire de catégories A+D+E, c’est-à-dire qu’elle est considérée comme devant rester absente de l’Union européenne. Elle est à déclaration obligatoire et soumise à des mesures d’urgence à mettre en œuvre en cas de foyers. Un réseau permanent de surveillance et de diagnostic existe. Il met à contribution le Laboratoire national de référence (LNR) porté par l’Anses, les éleveurs, les vétérinaires sanitaires, les techniciens d’élevage, les directions départementales en charge de la protection des populations, des agents de l’Office français de la biodiversité, des ornithologues, ainsi que les laboratoires vétérinaires de diagnostic.
Quel est le rôle de l’Anses pour éviter la propagation de l’influenza aviaire ?
L’Anses est laboratoire national de référence (LNR) pour effectuer notamment toutes les analyses de confirmation et les développements méthodologiques nécessaires au diagnostic de l’influenza aviaire. Le LNR vérifie régulièrement les compétences et anime le réseau des laboratoires vétérinaires agréés ou reconnus pour le diagnostic de première intention.
L’Anses intervient auprès des autorités sanitaires dans la gestion des épizooties, notamment au travers d’enquêtes épidémiologiques pour identifier les causes des foyers d’influenza et pour limiter les risques de diffusion. Elle conduit également des expérimentations destinées à évaluer l’efficacité de certaines approches de gestion : évaluation expérimentale de la durée d’assainissement des lisiers, contribution à l’étude de l’efficacité des candidats vaccins pour les palmipèdes, suivi de la persistance virale sur les sites d’enfouissement.
L’Agence conduit des travaux de recherche centrés sur le canard, relais potentiel de la transmission aux autres espèces de volailles, et sur la transmission inter-espèces des virus influenza aviaires. Ces travaux vont de la mise au point de méthodes de détection du virus dans les élevages et l’environnement, à la recherche de solutions pour réduire les risques d’introduction et de diffusion des virus.
En cas d’infection constatée dans des zones proches de la France, ou lors de mortalités d’oiseaux sauvages atteints d’influenza aviaire dans notre pays, l’Anses évalue les risques d’introduction et de diffusion de la maladie dans les élevages de volailles français. Elle fournit des avis scientifiques pour appuyer les autorités sanitaires dans la gestion de la maladie. Elle intervient en coordination avec les Centres nationaux de référence chargés de la caractérisation des virus grippaux humains, en interaction avec Santé publique France et les Agences régionales de santé compétents dans la surveillance et la gestion des éventuelles transmissions à l’être humain, pour analyser les risques que peuvent représenter pour l’être humain les virus influenza détectés chez les animaux.