Les valeurs limites pour les agents chimiques en milieu professionnel
Expertise nécessaire à l’élaboration des valeurs limites pour les substances chimiques en milieu professionnel
Depuis 2005, l’organisation de l’expertise scientifique, indépendante, pluridisciplinaire et collective, nécessaire à la fixation des valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) est confiée à l’Agence. Un comité d’experts spécialisé dédié a ainsi été mis en place pour appuyer l’Agence dans cette mission. En parallèle, l’Anses est également chargée d’élaborer une liste de substances chimiques prioritaires à expertiser qu’elle propose au ministère chargé du travail afin que ce dernier puisse élaborer le programme de la mission d’expertise VLEP après consultation des partenaires sociaux.
La prévention du risque chimique sur les lieux de travail se fonde prioritairement sur le principe de la substitution (remplacement d’un produit dangereux par un produit non ou moins nocif) ou à défaut, par la réduction des concentrations des polluants aux niveaux les plus faibles possibles. Pour un grand nombre d’agents chimiques dangereux, il est malgré tout nécessaire de protéger la santé des travailleurs en établissant des niveaux de concentration de polluants dans l’atmosphère des lieux de travail à ne pas dépasser sur une période de référence, ainsi que des valeurs limites biologiques.
Le ministère chargé du Travail est ainsi réglementairement chargé de fixer des valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) et des valeurs limites biologiques (VLB). Ces valeurs peuvent être contraignantes si elles sont fixées par décret ou, indicatives, si elles sont fixées par arrêté. Elles représentent un important outil de réduction du risque chimique sur les lieux de travail.
Dans le cadre du premier plan santé au travail, l’Agence a été missionnée en 2005, par le ministère chargé du Travail, afin d’organiser la phase d’expertise scientifique indépendante et collective nécessaire à l’élaboration de VLEP basées sur des critères sanitaires.
La phase d’expertise scientifique confiée à l’Anses a, non seulement, pour objectif de recommander des niveaux de concentration (atmosphériques et biologiques) pertinents pour la protection de la santé des travailleurs, mais également des méthodes de mesure permettant de comparer les expositions professionnelles aux VLEP préconisées.
Dans le cadre de ses engagements d’ouverture des travaux d’expertise à la société, l’Anses a mis en place fin 2012 deux types d’appels à contributions -en amont et en aval- de ces travaux qui ont vocation à enrichir et éclairer la démarche scientifique d’élaboration de ces valeurs. L’Agence répond ainsi également aux souhaits émis par son comité d’orientation thématique santé travail.
Comment procède l’Anses pour fixer les VLEP?
Les VLEP recommandées par l’Anses sont des concentrations dans l’air d’une substance chimique que peuvent respirer les travailleurs pendant un temps déterminé, sans entraîner d'effets néfastes pour leur santé, en l’état des connaissances au moment de l’expertise. Les niveaux sont déterminés en considérant que la population exposée (les travailleurs) est homogène, ne comprenant ni enfants ni personnes âgées.
Les niveaux de concentration sont déterminés à partir des données scientifiques issues d’études humaines (études épidémiologiques, cliniques) ou d’études expérimentales animales (études toxicologiques).
Lorsque jugé pertinent, en complément des VLEP atmosphériques, l’Anses se positionne sur des éléments pouvant être utiles pour la mise en place d'un suivi biologique des expositions par les médecins du travail : il s’agit de recommander le dosage de certains paramètres biologiques, de préférence dans les urines mais parfois également dans le sang ou l’air expiré, selon les substances. L'ensemble des voies d'exposition ainsi que certains facteurs interférant dans l'absorption (tel que le débit ventilatoire) sont ainsi pris en compte dans la recommandation de valeurs limites biologiques (VLB) et/ou de valeurs biologiques de référence (VBR).
Résultats et recommandations
Dans le cadre du plan santé au travail 2005-2009 (PST1), l'Agence a été chargée dans un premier temps de mener une expertise scientifique pour les substances suivantes : Toluène ; formaldéhyde ; 2-butoxyéthanol ; acétate de 2-butoxyéthyle (ou acétate de 2-Butoxyéthanol) ; dichlorométhane ; trichloroéthylène ; fibres céramiques réfractaires ; fibres d'amiante ; styrène ; oxyde de styrène ; perchloroéthylène (ou tétrachloroéthylène) ; acrylamide ; cadmium et composés ; composés du chrome VI ; 1,3-butadiène ; cobalt et composés ; monoxyde de carbone ; di-2-éthylhexylphtalate (DEHP) ; benzylbutylphtalate (BBP); di-n-butylphtalate (DBP); béryllium ; benzo[a]pyrène ; poussières sans effets spécifiques.
L'Anses a été saisie le 3 février 2012 par le ministère chargé du Travail pour mener la phase d'expertise scientifique pour les agents suivants : benzène, éthanol, endotoxines, octaméthylcyclotétrasiloxane (D4), décaméthylcyclopentasiloxane (D5), hexaméthylène diisocyanate (HDI), toluène diisocyanate (TDI), diphénylméthane diisocyanate (MDI), isophorone diisocyanate (IPDI), butanol, silice cristalline, hydrocarbures polycycliques aromatiques, expertise pour la surveillance biologique de 1PG2ME et de son acétate ; expertise en vue de la fixation d'une teneur minimale en oxygène.
L'Anses a été saisie le 11 mars 2013 par le ministère chargé du Travail pour réaliser prioritairement une expertise en vue de la révision de la valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) et de la valeur limite biologique (VLB) pour le plomb et ses composés. Il lui a également été demandé de procéder à une analyse comparative des réglementations en vigueur sur ce sujet dans les autres pays de l’Union européenne.
L'Anses a été saisie le 18 novembre 2015 par le ministère chargé du Travail pour réaliser prioritairement une expertise en vue de la révision des valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) pour les poussières sans effet spécifique.
Depuis que cette mission lui a été confiée, l’Agence a proposé plusieurs recommandations de valeurs limites d’exposition professionnelle atmosphériques, de valeurs limites biologiques ainsi que des rapports méthodologiques. Elle a par ailleurs réalisé un travail d’expertise portant sur l’évaluation des méthodes de mesure dans la perspective de la transposition en droit français de la réglementation européenne (directive 2009/161/UE).
VLEP : l’articulation des échelons français et européens
A l’échelle européenne, il existe un comité scientifique d’experts chargé de recommander des VLEP (CSLEP ou SCOEL selon la dénomination anglaise) sur lequel s’appuie la Commission européenne pour émettre les directives fixant des VLEP communautaires.
Les documents élaborés par le SCOEL font l’objet d’une phase de consultation des Etats-membres et des parties prenantes durant laquelle des commentaires, ou des compléments d’information scientifique, peuvent être soumis.
L’Anses est un point focal identifié en France pour l’expertise scientifique du SCOEL. A ce titre, elle est consultée pour faire une lecture critique et se positionner sur la pertinence des valeurs recommandées par ce comité. Dans un souci de mutualisation des ressources d’expertise, et sauf désaccord de fond, les substances récemment expertisées au niveau européen ne font pas l’objet d’une expertise spécifique au niveau national pour ce qui concerne les effets sanitaires. Par contre, l’évaluation des méthodes de mesure des polluants en milieu professionnel reste à la charge du CES VLEP dans la mesure où le SCOEL aborde peu cet item.